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1 octobre 2023 7 01 /10 /octobre /2023 22:36

Le contrat à durée déterminée est prévu dans des cas limitativement énumérés par la loi, et en particulier concernant le remplacement.

Il résulte de l'article L.1242-2 du code du travail que le contrat de travail à durée déterminée peut être conclu pour le remplacement d'un salarié en cas d'absence, de passage provisoire à temps partiel, de suspension de contrat, de départ définitif d'un salarié avant la suppression de son poste, d'attente de l'entrée en service d'un salarié recruté en contrat à durée indéterminée appelé à le remplacer.

 

Le CDD de remplacement permet de pourvoir au remplacement d'un salarié absent. Mais quelle est la portée de ce remplacement ?

 

Un seul salarié absent

 

La Cour de cassation a eu à se prononcer sur la question de savoir s'il était possible de remplacer, par voie de contrat à durée déterminée, plusieurs salariés.

A la condition de mentionner leurs différents noms dans le contrat de travail, était-il possible à un salarié de pourvoir aux remplacements de différents salariés ?

Il est vrai que « le nom et la qualification de la personne remplacée » figurent au titre des mentions obligatoires prescrites par l'article L.1242-12 du code du travail.

Ces mentions obligatoires posent une problématique, car en l'absence des mentions prévues à l'alinéa 1er (obligation d'écrit, définition précise du motif), le contrat est requalifié en contrat de travail à durée indéterminée. La problématique a été de savoir si les mentions obligatoires suivantes (dans l'article L.1242-12), qui incluent le « nom et la qualification » de la personne remplacée, sont des mentions qui, si elles font défaut, entraînent la requalification en CDI ou une autre sanction ? La jurisprudence a eu à se prononcer sur la mention obligatoire de la qualification de la personne remplacée, et a jugé qu'en pareille hypothèse, lorsqu'elle fait défaut, le contrat doit être requalifié en CDI (Soc. 6 mai 1997, n°94-41.940).

La mention de la personne remplacée est donc une formalité substantielle.

Dans ce contexte, était-il possible d'envisager un contrat qui prévoit le remplacement de plusieurs salariés, faisant mention de tous leurs noms et qualifications ?

La Chambre sociale a répondu par la négative en prohibant les contrats visant à remplacer plusieurs salariés (Soc. 28 juin 2006, n°04-43.056). Le CDD « ne peut être conclu que pour le remplacement d'un seul salarié en cas d'absence ». Néanmoins, une loi récente est venue permettre dans certains secteurs d'activités, de recourir à cette formule de manière expérimentale (loi n°2022-1598 du 21 décembre 2022, article 6 ; voir le décret qui définit les secteurs d'activités jusqu'en 2025 : décret n°2023-263 du 12 avril 2023).

 

Un salarié absent, au sens large

 

Si le multi-remplacement (formule de P-Y Verkindt) est interdit, force est de constater que des entorses à l'obligation de remplacer le salarié absent ont eu lieu.

Ainsi, la Chambre sociale a admis le remplacement en cascade. En d'autres termes, que le salarié recruté en remplacement d'une personne absente ne soit pas directement affecté au poste laissé vacant par la personne absente, et que l'employeur pouvait l'affecter à un autre poste, au titre de son pouvoir de direction (Soc. 16 juillet 1997, n°94-42.398).

Par ailleurs, il n'est pas obligatoire que le remplaçant exerce à temps complet. Ainsi, un salarié recruté à temps partiel pour effectuer des tâches nécessitant donc des qualifications moindres était valablement embauché selon un CDD de remplacement, le recours au CDD pour le remplacement d'un salarié absent (chef de service) n'exclut pas la possibilité d'un remplacement partiel (par un commis de cuisine). C'est ce qu'a jugé la Cour de cassation dans un arrêt de 2002 (Soc. 15 oct. 2002, n°00-40.623).

Notons qu'il est interdit de remplacer un salarié gréviste (article L.1242-6 du code du travail) outre les autres cas d'interdictions que sont l'embauche pendant 6 mois après un licenciement économique et l'embauche pour des travaux particulièrement dangereux.

 

Que le remplacement implique un CDD ou des CDD, il importe, comme tout CDD quel que soit son motif, qu'il ne vienne « pas avoir pour objet ou pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise » (article L.1242-1 du code du travail).

 

Un CDD pour remplacer un salarié

 

Il est intéressant de noter les possibilités qui sont offertes en matière de CDD pour remplacer un salarié absent ou dont le contrat est suspendu. Le contrat de travail à durée déterminée peut comporter un terme précis (une date d'échéance, une durée en jours, en semaines ou en mois). Le contrat de la personne embauchée en remplacement peut, pour des raisons pratiques de formation, prendre effet avant l'absence de la personne à remplacer (art. L.1242-9 du code du travail).

Si la personne revient avant le terme mentionné au contrat, l'employeur sera tenu de payer au remplaçant l'ensemble des salaires restant dus jusqu'à la fin de la période prévue au contrat.

Si à l'échéance du terme, la personne remplacée n'est toujours pas revenue, il est loisible pour l'employeur de renouveler pour une nouvelle période par avenant, ou de façon plus originale de prévoir un report du terme « jusqu'au surlendemain du jour où la personne remplacée reprend son emploi » (article L.1243-7 du code du travail).

Si l'une ou l'autre de ces options n'est pas privilégiée, l'employeur pourra conclure un nouveau contrat avec le salarié, dans le cadre de CDD successifs. S'il ne le fait pas et que la relation se poursuit après le terme, le contrat devient un contrat à durée indéterminée (article L.1243-11 du code du travail).

La durée maximale du CDD avec un terme précis ne peut en principe dépasser des durées fixées par convention ou accord collectif de branche étendu (ordonnance du 22 septembre 2017), qui si elles font défaut laissent place à la durée de principe antérieurement obligatoire, une durée de 18 mois, renouvellement compris.

 

Des CDD pour remplacer un ou des salariés

 

Des CDD successifs ou un contrat sans terme précis ne doivent pas permettre au salarié d'occuper un poste lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise, sinon la relation sera requalifiée, avec allocation d'une indemnité spéciale de requalification (article L.1245-1 du code du travail et Soc. 19 janvier 1999). La directive 1999/70/CE du 28 juin 1999 mettant en oeuvre l'accord-cadre du 18 mars 1999 sur le travail à durée déterminée vise à prévenir les abus en la matière (clause 5). La jurisprudence de la Chambre sociale y fait régulièrement référence (surtout en matière de CDD d'usage, voir article précédent).

Des CDD successifs peuvent permettre de remplacer un salarié sur un même poste de travail jusqu'à son retour. La loi prohibe en principe cette possibilité en imposant le respect d'un délai de carence (art. L.1244-3 du code du travail). Les modalités de calcul de ce délai de carence sont désormais prévues par convention ou accord de branche étendu et à défaut c'est la loi qui le fixe (tiers-temps...)

Néanmoins, il est écarté en différentes hypothèses et c'est le cas de la succession de contrats de remplacements d'un salarié absent sur le même poste (article L.1244-4-1 du code du travail), hypothèse que la Cour de cassation a confirmé (Soc. 17 novembre 2021, n°20-18.336)

Un contrat sans terme précis pourra, en prévoyant une durée minimale d'engagement, qui va servir de base au calcul de la durée de la période d'essai, permettre d'embaucher la personne en CDD pour une durée non limitée.

Néanmoins, dans ces deux cas, CDD successifs et contrat sans terme précis, il faudra s'arranger pour que le poste ne vienne pas à faire occuper au salarié durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise.

Dans de nombreuses hypothèses la Cour de cassation vient requalifier la situation de salariés embauchés dans le cadre de CDD successifs sur des postes différents (article L.1244-1 du code du travail).

Une receveuse de péage ayant effectué sur plus d'un an 22 contrats de remplacements de différents salariés qui avait occupé des tâches identiques avec la même qualification dans six postes de péage occupait un poste lié à l'activité normale et permanente et devait voir ses contrats à durée déterminée requalifiés en CDI (Soc. 29 sept. 2004, n°02-43.249, voir aussi 14 septembre 2016, n°14-15.604).

Notons qu'en dehors des sanctions civiles trouvent à s'appliquer des sanctions pénales chaque fois qu'un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise est pourvu par CDD, d'une amende de 3750 € (article L.1248-1 du code du travail).

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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